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Vie et moeurs de monsieur Henry Dickson

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mercredi

INTERROGATOIRE 5

LE NOM HENRY DICKSON

- Vous écriviez donc sur DOUTEUR 

- Et je continue à le faire. Avec des dessins. 

Il y avait un slogan d'une école de dessin: 

«Si vous savez écrire, vous savez dessiner. »


http://www.nytimes.com/2002/11/10/education/distance-learning-if-you-can-t-draw-this.html

Et de petits mots. 

Les dessins sont vraiment petits, de petits mots sont nécessaires. Un peu comme les cartoons du New Yorker.

Il ne faut pas oublier Vinci: 

La Pittura è cosa mentale - La peinture est « chose mentale »

http://agora.qc.ca/documents/leonard_de_vinci--leonard_de_vinci__lartiste_par_gabriel_seailles

Les mots permettant d'aller jusqu'à un certain point. Les images ne sont pas meilleures ou plus efficaces mais elles vont là où les mots ont atteint leur limite. Ensuite, il y a la musique qui est définitivement hors de ma portée.

-  La méditation. Il paraît que.

- Quant à méditer sur ma vie intérieure!? Je suis incapable. Méditer me donne envie de me gratter. C'est aussi pénible que de faire du sport. Et je n'ai pas de vie intérieure.

- Vous ne pensez jamais ?

- Je sais ou je découvre ce que je pense en lisant ce que j'ai écrit ou dessiné. Je ne sais pas s'il y a une section de psy qui parle de ce genre de cas.

- Votre style?

- Et quant à ma famille d'artiste, ceux qui me sont apparentés, accidentellement. Je pense qu'on ne choisit pas. Mais je ne pourrais pas dire la raison. Enfant, c'était Michel Ange, comme je l'ai dit. Maintenant, c'est KH. 

- Est-ce du pop ?

- J'aime bien Keith Haring et ses petits bonhommes joyeux ou fâchés et son bébé radioactif. 

Il disait que n'importe qui pouvait faire ce qu'il faisait et n'importe qui faisait ce qu'il faisait - inexplicablement fasciné par ce qu'ils découvraient - et il les encourageait. Mais lui-seul était Keith Haring. Même après sa mort.

Et n'importe qui peut faire mes petits bonhommes en triangle. J'expliquerai leur naissance plus tard.

Avant, il y eut le nom.

Et une sorte d'icône bidouillée avec le logiciel Print. Le premier dessin de la famille. Un peu n'importe quoi n'importe comment.

Servant d'identifiant ou de «photo» - suggestion de Google. On peut en mettre une vraie ou un petit animal qui sert d'avatar ou de signature. 

On en voit dans les commentaires des commentateurs des sites internets. Certains sont tout à fait imprudent lorsqu'ils choisissent leurs formes «spirituelles» ou «intellectuelle». La plupart des gens n'ont aucun goût et aucun sens visuel et ils laissent le hasard choisir pour eux - ce qui est une très mauvaise chose pour eux. 

Quelques critiques se plaignent de la virulence de certains commentaires «spontanés» sur les «réseaux sociaux» - si on y avait réfléchi davantage - peut-être que !? - mais c'est tout à fait normal. On donne à une partie des gens qui n'avaient pas la chance de s'exprimer, l'occasion de le faire. En tout anonymat. Et comme ils n'ont pas l'habitude de réfléchir en écrivant ou même avant d'écrire ou avant de parler, on a ce qu'on a. 

Ça sort tout croche mais ça vient du coeur. Comme on disait. Le coeur n'étant sans doute pas le bon organe?

Il y eut le beau cas lors de l'affaire Coeur de Pirate (je nomme ceci ainsi). La jolie chanteuse très douée avait gagnée son premier prix et il y avait un animateur radio (qui a, paraît-il perdu son job depuis) qui, poussé par Jung ou Freud ou Cesare Lombroso a
à écrit (décrit) sa frustration sexuelle en toute innocente et spontanément: CDP. En toutes lettres. Expression québécoise documentée immondément sexiste que je n'utiliserai que lors d'un dialogue dans un roman. 

On ne sait pour quelle raison. Il n'y en avait aucun. On le répète la jeune chanteuse, musicienne, compositrice, jolie, originale, bourrée de talent venait d'être reconnue par ses collègues artistes et le public. 

Quand j'étais enfant: on parlait de la tentation du Démon. Et de la possession du même démon ou de ses cousins. Comme des choses parfaitement naturelle.

On pourrait étudier l'affaire Gab Roy/Mariloup Wolfe avec la même loupe. Mais c'est encore plus compliqué. 

Et à moins qu'on me force à penser davantage, j'éviterai. Quoiqu'on dise: penser est très fatiguant. Ce qui fait que la plupart des gens évitent. D'autant plus qu'ils ne sont pas équipés pour ça.

Après un détour sur l'autoroute des risques de la liberté de parole et des joies perverses de la liberté de censure, je reviens à mon expérience de blogeur.

Toujours DOUTEUR.

Rewind.

Nom du site. Et signature des textes de commentaires de commentaires.

Jusqu'à ce que la fatigue s'installe. L'envie d'autre chose.

Saut dans le futur.

Et c'est l'histoire, la vie et les moeurs du Professeur Bulle qui a débordé partout.

Bien avant qu'il trouve une forme illustrée, il y avait son nom. Profondément insignifiant. Bon pour les enfants. 

Rewind.

J'avais fini - en quelques secondes - par trouver le nom du site. Et, des mois ou des années plus tard, ce que je voulais en faire. Et toutes les possibilités du mot DOUTEUR, adjectif ou verbe. Qui contribuait parfaitement au sens que je voulait lui donner: 


Douteur je doute. On ne doute jamais assez. Tout ce qu'on vous dit est faux. Tout ce que vous savez est faux. Parce que tout ce qu'on vous dit est faux. Mais il se peut qu'une partie de ce que savez soit vraie mais laquelle? Le professeur Bulle a parlé. Ou pensé quelque chose. Ou eut une émotion quelconque. Le professeur Bulle pense quelques fois par année donc il lui arrive d'être. Mais pas souvent!

Mais, un jour, tout ceci devenait trop savant ou trop sérieux. 

Je n'allais pas me mettre effectivement à douter de tout. Non que ce ne soit pas nécessaire. Car à peu près rien de ce qu'on vous dit n'est vrai. 

Mais c'est très fatiguant.

Et ma tête est trop légère.

Le nom du Professeur Bulle m'était venu à la tête ou à l'esprit, comme tout le reste, et il et resté. Et me servira de signature. 

Rien n'a d'importance. De toute façon.

Il y a tant de gens qui se prennent au sérieux. On n'a pas besoin d'un de plus.

J'ai d'ailleurs donné une recette de Tête Fromagée dans le site. Adapté de la sorte de creton (mais plus gélatineux) à la cervelle (de veau) (avec des oignons) aimée des français qui furent désespérés de ne plus en trouver pour cause de maladie de la vache folle et attaque de prions - on donna à manger à des herbivores la viande de leurs semblables décédés. Restes invendables ou pourris, pas bon pour de la nourriture à chien/chat/vison. Le tout étant ensuite bouffée par les humains. La Nature s'en amusa et inventa des conséquences.

J'ajoute toujours: il doit y avoir une morale à cette histoire et on la cherche.

Et, perfidement, je suggérais que le cerveau d'un certain nombre de mes concitoyens, parfaitement inutile pouvait avantageusement servir, une fois bouillie (avec des oignons) et refroidie, tartinée sur une tranche de pain frais beurrée.

Un commentateur m'informa qu'il n'appréciais pas et que j'avais très mauvais goût. Ce dont je doute.

Donc

Je poursuivais mes ébats médiatique sur le Web avec un site connue d'une seule personne. Une amie que j'avais informés de mes projets et qui regardait comme d'habitude les yeux au ciel en se demandant quelle autre connerie je ferais. Les autres arrivèrent par le plus grand des hasards.

Quelques années après le début du site où j'écrivais en tant qu'écrivain. Je redevins romancier.

Dans ma vie un peu trop longue, j'ai écrit quelques romans. Généralement 1 tous les 10 ans. Il y avait 20 ans que je n'avais rien romancé. N'ayant aucune idée en ce sens, ce qui m'apparaît une excuse suffisante.

Et puis un matin.

Ça a écrit.

Comme d'habitude, mon intervention personnelles fut très limitée.

Et c'était une histoire du genre fantastique/horreur. En plus complexe que les courts textes de la série Château Hanté. Mais dans le même lieu. 

Pourquoi?

Je ne me pose jamais ce genre de question.

Je suis la seule personne qui pourrait y répondre et comme je n'en ai aucune idée, aussi bien passer son tour. Quant aux autres, qu'est-ce qu'ils en savent?

Le roman dura quelques mois.

Je le lisais en l'écrivant.

Et puis arriva la guerre.

Je l'aurais sans doute terminé au rythme où j'allais et il n'est pas encore fini parce, qu'entre temps, je fus interrompu. Et le suis toujours et encore. 

- Quelle guerre?

- Encore une fois, les crétins qui nous dirigent avaient décidé de ce qui était bien pour nous. Manipulateur manipulateur et demi. Ils s'étaient fait eux-aussi enfirouaper. Libye. C'est tout récent. 

Les employés des médias imploraient qu'on intervienne. Et, majoritairement, sur la chef du Parti Vert vota. C'est ça qui est beau. Le Parlement d'Ottawa vote - on trouve le texte dans leur journal, le Hansard, un vote d'appui à la population supposément brimée par un terrible dictateur Kadhafi. Et une partie du peuple s'était supposément révoltée. C'était avant ce qu'on a appelé Le Printemps Arabe.

On ne vota jamais pour envahir le pays. Ou le bombarder. Un ministre dit que personne n'avait l'intention d'intervenir, d'envahir le pays, de renverser le gouvernement, de tuer le président/dictateur. 

Il fallait appuyer une résolution de l'ONU qui allait dans le même sens. Dire du bien. Ressentir de bonnes choses. Éprouver des émotions positives. 

Il y avait bien la doctrine RdP.

Responsabilité de Protéger.



Caché dans les belles intentions du texte: 

Si un gouvernement ou un chef de gouvernement opprime son peuple ou est incapable de le protéger on a le droit et le devoir de le faire à sa place. 

ON. Étant l'Occident. 

ON. Étant les USA. 

Sans arrière pensée. Bien sûr.

Mais les États ont toujours des arrière-pensées.

Monsieur Jean Chrétien qui, contrairement à son nom, n'était pas un enfant de choeur racontait que lorsque les USA voulaient pousser le Canada à intervenir (on utilisera ce mot souvent) la deuxième fois en Irak a dit qu'il était d'accord, s'ils réussissaient à faire voter une résolution à l'ONU. Il raconta aussi que Tony Blair, le chien de poche bloque des USA vint à son tour supplier avec des yeux larmoyants - l'ambassadeur US ne suppliait pas. Ce sont eux l'empire actuel plus les Britanniques. Chrétien leur dit: vous voulez aller en Irak, d'accord. Vous savez ce que je veux. Saddam Hussein est méchant. Il n'est pas le seul. En Afrique, ça va mal. Il y avait même un pays de là-bas qui allait justement très mal à ce moment et ne va toujours pas mieux des années plus tard. Mais vous n'irez pas, parce qu'il n'y a pas de pétrole. Finalement, le Canada n'ira pas. Les politiciens US traitèrent le Canada  de traître. Les bons citoyens US commencèrent à tirer sur les camions avec des noms ou des plaques canadiennes. Paul Martin, le successeur de Chrétien, n'eut pas le choix d'échanger l'Irak - on y est allé quand même mais avec un petit nombre de spécialistes des services secrets - et ce n'est pas cette aide, bien petite, qui était espérée. Mais l'appui public à la cause. Et l'envoi visible de soldats. On alla en Afghanistan. Pour rien. 158 soldats morts pour rien. Mais il fallait les sacrifier - avec quelques milliards - pour maintenir la bonne réputation du pays auprès de l'empire.

- La Libye

- Pareil. Pétrole. Or. Des tas de fric. Kadhafi pour faire un pied de nez aux USA, disait qu'il accepterait que son pétrole soit payé en euros ou en or. Comme Saddam Hussein avant. On sait ce qui lui est arrivé. Les USA ne survivent à la faillite qui leur pend au nez que parce que leur $ est devenu la monnaie internationale. Sans correspondance avec l'or. Du jour où les États s'en passent. Plouf ! Mais les petits avantgardistes qui auront pris cette initiative avant les grands les paieront.

- La théorie du complot !

- Il manque la lamentation. Généralement, quand il y a un employé des médias dans les environs, il se met à se lamenter en faisant des bruits bizarres. Des petits cris de douleur. C'est très amusant. Comme s'ils étaient incapables - et c'est probablement le cas - d'imaginer que les États sont autre chose que des Calinours, le coeur sur la main. On appelle les cyniques: les théoriciens du complot. Vous ne pensez pas que le parti Libéral est honnête. Bingo. On finit par dire que 7 - sept - compagnies s'échangeaient les contrats à Montréal. Reliées à la Mafia. En plus. Avant, c'était inimaginable. On le dit. On va cesser de le dire. Il est inconcevable que nos élites industrieuses et financieuses soit des immondes crapules. Nos élites chambredecommercieuses.

- Donc on vota.

- On vota. Si on revient à Kadhafi. À la Chambre des Communes. Tous nos crétins votèrent. Y compris les lustres du Bloc Québécois. À l'ONU. Aussi. Mais rien de grave ou d'offensants.

- Il fallait aider le peuple Libyen.

- Non en envoyant des observateurs. La Croix Rouge. Médecin du Monde. En tirant dans le tas. On voit comme interpréter un texte peut être difficile pour certaines personnes. On tira donc sur les Libyens. Les mauvais. On tua tant qu'on put l'armée du pays. Détruisit ses avions. Ses bases. Pour laisser toute la place aux opposants. Qui n'était soudainement plus des démocrates demandant la liberté de parole pour faire des poèmes. Mais des combattants armés, par nous, subventionnés, par nous. Et on tua Kadhafi.

- Le pays va mieux depuis.

- Il est en guerre civile et on se massacre jusqu'à ce que le pire prenne le pouvoir. Tous les jours, on en parlait. Depuis que le chef est mort et que la liberté est arrivé, on n'en parle plus. D'un coup que les gens commencent à se poser des questions. Par exemple: est-ce que c'était si pire avant ? Ben non. C'était un des pays les plus riches du coin. Ou la population était la plus aidée par l'État. Comme l'était celle d'Irak. Comme celle de Syrie. 

- Nous voila avec la Syrie.

- J'avais suivie distraitement l'affaire Libyenne. Comme je ne me faisais aucune illusion, ce qui est arrivé était tout à fait aussi dégueulasse que ce que j'imaginais. Tout peut toujours être pire.

- Vous écriviez votre histoire de Château Hanté.

- Et voilà que ça recommençait. Comme aujourd'hui, les mêmes avec l'Ukraine et la Russie. Mais à ce moment, c'était la Syrie. Il fallait intervenir.

- On ne dit pas bombarder, envahir, conquérir. 

- Le flou artistique.

- Mais en quoi ça vous concernait ? Et que pouviez-vous faire?

- Rien. Citoyen zéro au milieu du troupeau de numéros zéros.

- Vous n'aviez qu'à penser à autre chose.

- C'est ce que je réussis très bien à faire généralement. Puis m'est venu cette idée ou est arrivé devant mes yeux cette idée qui n'était pas de moi. Un commentateur d'article du site internet de Radio Canada expliqua tout en 1 ligne. Libye. Syrie. Iran. Guerre mondiale.

- C'est un peu court. 

- Tous des ennemis des USA et d'Israël qui grenouille et pustule partout. Un à un, dans la trappe. Mais à la fin, il reste la Russie. Si le Moyen-Orient est contrôlé par l'Occident, l'Ouest - peu importe - et le pétrole du Moyen-Orient, il reste aux autres à devenir comme nous des vassaux des USA. Ce qui n'est pas si mal. Il y a eu des pays qui ont du se soumettre à pire. Le temps que les USA s'effondre. Comme tous les empires avant. Ou. S'ils ne veulent pas. 

- Guerre Mondiale.

- Voilà.

- Et même si c'était le cas, que pouviez-vous faire à part rien. Prier. Envoyer des lettres. Amnesty International. Brûler des lampions.

- Un citoyen ne peut rien faire. Il ne compte pas. Un citoyen riche. Célèbre. Puissant. Bien placé. Oui. Mais quand les Affaires Étrangères et le Ministère de la Guerre (appelé ici, Ministère de la Défense) décide. Ou qu'il doit obéir à son maître comme un petit ou un gros chien. Rien.

- Mais si on dit qu'on ne peut rien faire - même si c'est vrai qu'on ne peut rien faire et que qui qu'on fasse, rien ne changera à ce qui doit se passer - il peut vous passer par la tête de faire quelque chose.

- Envoyer une lettre à la mairesse. À la députée. À l'archevêché ?

- On est à ce niveau. 

- Mais il me semblait que vous vous foutiez de l'humanité ?

- Je suis pour la destruction de l'humanité. Étant donné ses moeurs et coutumes, elle ne mérite pas meilleur sort. Mais je ne peux pas plus précipiter les choses - la Nature s'en chargera quand le moment sera venu - ni sauver les meubles. Ou un coussin.

- Donc il vous est venu une idée stupide.

- Une série. S'il y a une guerre, je n'irais pas. Je suis trop vieux. Et j'ai les pieds plats. Je serai plus bon à être fusillé qu'autre chose. Mais j'ai des neveux. Juste du bon âge. Même si ce sont des cons - mettons que ce n'est pas tout le temps. Et des nièces - car les filles seront incorporées aussi. Les femmes voulaient l'égalité des droits avec les hommes. Elles vont découvrir que c'est aussi le droit de se faire tuer avec eux. Ça vient avec. Votre vie appartient à l'État. On n'y pense jamais. Ce n'est qu'en temps de guerre qu'on le redécouvre. On se dépêche de le faire oublier après. 

- Belle et noble intention. Tout à fait absurde. Vous ne pouvez rien changer à ce qui va arriver. Et vos neveux seront sans doute bien content de défendre la liberté chez les autres et de mourir pour une médaille en plastique. Ils vous en voudront peut-être de les empêcher d'être des héros.

- Quoi faire?

- Rien. Pourquoi ne pas continuer à rien faire comme d'habitude ? Comme la chorale sur le Titanic.

- Je lisais Radio-Canada. CBC. BBC. Et les commentaires des articles sur RC. À ce moment, on mettait la date et l'heure des interventions. Et il y avait des zélés qui écrivaient jour et nuit pour qu'on «intervienne» en Syrie. Des supposés démocrates. Amis du peuple. La majorité des écriveurs. Comme la majorité des supposés professionnels du stylo, du clavier et de l'information. Quand on dit qu'on est dans une société libre. Que l'individu existe. Que l'on a des idées «personnelles». On est des moutons. Amateurs. Ou pro.

- Et vous avez décidé de les contredire ?

- Dit comme ça, ça paraît encore plus stupide que de le faire. Sur RC, il y avait bien quelques personnes qui essayaient de faire réfléchir les autres. De dire qu'il y avait peut-être un autre côté à la médaille. Qu'il fallait penser. Et la plupart des autres qui n'avaient jamais pensé à la Syrie avant. Qui ne savaient même pas où c'était. Étaient prêt à l'envahir ou la bombarder pour sauver son peuple. Des puces sur des électrodes.

- Le courant prenait de la force et on allait inévitablement

- Répéter officiellement le scénario Libyen. Pour le bien des citoyens. À la demande du peuple.

_ Même si c'était absurde, ne servait à rien. J'ai donc décider de mettre mon grain de sel. Là où mon regard se posait. Sans me forcer. Sur le site de RC. Pourquoi ne pas emmerder tous ces apôtres. Poser des questions gênantes. On n'avait que des réponses. Mais chez les pro, c'était pas mieux. Information libre et équilibré. Mon cul! Personne ne posait de question au chef Syrien. On disait qu'on ne pouvait pas. Mais quand on a pu- des journalistes d'ailleurs y sont allés - mais pas nous. C'était le méchant. On était dans un conte. On était les bons. Le méchant devait partir. Ou mourir. 

- Comment on «intervient»?

- Je me suis inscrit au site de RC.  C'était facile. Mais je ne savais pas dans quel emmerdement je me plongeais. Car je ne connaissais pas encore les «modérateurs» de RC. Quoique ceux du Devoir soient encore pire. À RC, il y en avait qui laissait passer mes textes et d'autres qui coupaient systématiquement. 

- Comment le saviez-vous ? Vous ne pouviez les rencontrer ? C'est anonyme. On coupe un texte écrit. Ou on empêche qu'il soit publié.

- Le même texte, les mêmes idées sur le même sujet - je répondais et je posais toujours les mêmes questions - passait un moment. Et tout à coup, plus rien ne passait. Impossible de savoir pourquoi. Je devinais qu'il y avait un quart. Un ou des modérateurs se remplaçant. Et, tout à coup, le courant passait à nouveau.

- Et ça donnait quoi?

- Ça aidait le tondu qui osait aller contre le mouvement général. Il y en avait 1 et 2. Il y en eut 3. Et la meute qui répétait la même chose continuait. Tout à coup, ça donnait le courage à un autre type bizarre de poser des questions. D'aller à contre courant. 

J'ai fait ça pendant 1 an jusqu'à ce que je vois que le jeu s'équilibrait. Il y avait toujours plus d'imploreurs fascinés par le massacre à venir mais, graduellement, quelques contestataires de plus. Ce qui déplaisait à tous les autres. 

Puis je suis passé à autre chose. Bien avant que la Russie intervienne pour couper l'inspiration de tous. Et, soudainement, on a cessé d'en parler. Alors que tous les jours et plusieurs fois par jour, sur RC, il y avait un article qui dénonçait le tyran. Là, ça devenait sérieux. On a recommencé ce printemps avec l'Ukraine mais c'est plus délicat. On est entre grande personne. 

- Et il en est resté quoi?

- Je me suis inscrit sur le site de RC sous le nom de Henry Dickson. Je le suis encore mais je n'interviens plus. Échaudé par les modérateurs morons. Et le nom d'Henry Dickson alla ailleurs faire autre chose. Ce que nous verrons plus tard.